Avo, soutenu par SESAAM, obtient sa licence de sociologie.
C’est à lui qu’en revient tout le mérite, mais nous en sommes aussi fiers que lui!
Avo, un des premiers étudiants que nous avons soutenus, vient d’obtenir sa licence de sociologie de l’université d’Ankatso, à Antananarivo, la capitale de Madagascar. Son parcours est exemplaire, nous en sommes très admiratifs, bravo Avo!
Écoutons-le nous raconter son histoire.
Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je m’appelle ANDRIAMAROSON Rina Avo, certains me surnomment AVO et d’autres Rina. Je suis né le 13 Novembre 1997, donc j’ai 21 ans. J’habite à Andravoahangy Ambony, c’est un quartier de la capitale Antananarivo.
Je suis fils unique, on me dit souvent: « Tu as de la chance d’être comme ça, mes frères et mes sœurs sont vraiment lassants » mais je vous affirme qu’on ressent parfois la solitude. Je suis très actif mais je parviens quand même à me détendre ! Je m’ouvre aux autres mais je réfléchis trop aussi (un de mes défauts). Je ne sais pas montrer mes émotions mais j’ai un grand cœur pour mes proches et ceux que j’aime et à qui je fais confiance. En ce moment, j’étudie à l’Université publique d’Antananarivo. Je poursuis actuellement la filière Sociologie et je viens d’obtenir ma licence.
J’adore les mangas, et aussi un peu les documentaires. J’aime jouer aux jeux vidéo, au football+ (pas très souvent mais j’aime), aux échecs.
Je vis encore avec ma mère mais je m’efforce de ne pas lui alourdir la tâche car durant toute mon enfance, elle a tout fait pour que je n’arrête pas l’école. Aussi, j’essaie de ne pas la décevoir. Comme nous ne sommes plus que tous les deux, je dois travailler pour pouvoir m’occuper d’elle plus tard. Et ça a vraiment changé ma vie quand vous et le centre y êtes entrés afin que je réalise mes rêves.
Quel est ton meilleur souvenir avec le centre Akany Avoko Ambohidratrimo ?
Je n’ai pas vécu au centre, il m’apportait une aide financière, mais il y a des souvenirs que je n’oublierai pas, comme ma première rencontre avec Madame Lalasoa*, puis Pascale et Olivier** (je sais, vous n’êtes pas du centre mais c’est le centre qui m’a permis de vous rencontrer) ; et surtout la course du cœur que l’on a fait récemment avec les autres étudiants aidés par Sesaam : nous avons collecté au supermarché des produits de première nécessité pour que les enfants du centre puissent fêter Noël.
Pourquoi as-tu eu envie de faire des études ? Qu’est-ce qui t’a amené à vouloir faire des études de sociologie ?
Les études pour moi, c’est la seule voie possible pour sortir de ma situation et avoir une bonne base pour ma carrière professionnelle. D’autant plus qu’avoir un diplôme me permettra peut-être d’avoir un emploi pour que j’aide ma mère, cela nous apporte une lueur d’espoir pour une meilleure vie.
J’ai suivi le cursus de Sociologie car je m’intéresse vraiment aux questions sociales, je veux aider les enfants qui sont dans le besoin et cette motivation coïncide vraiment avec ce que vous et le centre AAA faites pour nous, cela me motive encore plus. La pauvreté est omniprésente à Madagascar, les politiciens ne se préoccupent que d’eux et pas de la population. Or les personnes pauvres, sans abri sont très nombreuses. En tant qu’être humain comme eux, j’ai envie de les aider et de donner, même si ce n’est qu’une modeste contribution.
J’espère aussi que mes études de sociologie me permettront de trouver un travail stable.
Est-ce que tout enfant malgache a la possibilité de suivre des études s’il le désire ? Par exemple, est-ce que l’école est gratuite pour tous et jusqu’à quel niveau ?
Madagascar est un des 5 pays les plus pauvres du monde. Les enfants malgaches n’ont pas tous la même possibilité de suivre des études car ils sont victimes d’un cercle vicieux dont il est impossible de sortir : les parents qui ne sont pas diplômés et qui n’ont pas d’emploi stable ne parviennent même pas à nourrir leurs enfants, a fortiori à financer leurs études, d’où le décrochage scolaire même si les enfants souhaiteraient continuer. Le plus triste c’est que certains parents sont amenés à laisser leurs enfants travailler au lieu d’étudier. La responsabilité n’incombe pas seulement aux parents : dans les zones rurales ou très éloignées des villes, il n’y a pas d’infrastructures scolaires ni d’enseignants.
L’école gratuite à Madagascar est encore un rêve ; les politiciens le disent mais personne n’a encore rien fait. Les écoles publiques demandent des droits d’inscription alors qu’elles devraient être gratuites.
Quelles difficultés as-tu rencontrées pour arriver en licence ? Qu’est-ce qui manque le plus à un étudiant malgache pour mener à bien ses études ? (livres, méthodologie, matériel, aide… ?). Quelles sont les plus grandes difficultés quand on est étudiant à Madagascar ?
L’une des grandes difficultés en tant qu’étudiant, c’est de se procurer les livres qui sont très chers. Au niveau du matériel, il nous manque des téléphones qui seraient indispensables pour prendre des photos : emploi du temps, fiche d’inscription, etc. … ainsi que des ordinateurs pour la rédaction de mémoires, et surtout l’accès à internet pour se documenter et faire des recherches. Mais il existe aussi des difficultés telles que les transports (les bus sont rares le soir), le déjeuner : on n’a que 30 minutes pour manger, on n’a pas le temps de rentrer chez soi et il n’y a pas de restauration collective.
Après tes études, que souhaiterais-tu faire ?
Je souhaiterais travailler et avoir un emploi stable afin d’aider ma mère, le centre ou d’aider les enfants qui veulent étudier.
Quels conseils donnerais-tu à d’autres jeunes comme toi ?
Il ne faut pas abandonner malgré les difficultés, il faut persévérer et faire des efforts avec ce qu’on a. Etre étudiant aussi, c’est faire des recherches personnelles.
Quels sont les trois verbes qui te décriraient le mieux ?
Pouvoir, Travailler, Persévérer et se destresser un peu quand même.
Si tu pouvais exprimer tes trois rêves les plus chers, quels seraient-ils ?
Mon premier rêve, c’est de sortir de cette situation pour avoir une vie un peu meilleure en travaillant dur.
Mon deuxième rêve, c’est de pouvoir contribuer aux bonheurs des enfants défavorisés, et des enfants qui veulent étudier.
Mon troisième rêve, peut être impossible, c’est d’avoir un PS4 (je ne sais pas si j’en aurai une durant toute ma vie mais il faut quand même espérer) ;
Je voulais écrire un petit mot pour les membres de SESAAM, je ne sais par quels moyens vous remercier pour ce que vous faites mais vous me donnez espoir, espoir de croire en quelque chose, espoir de pouvoir réaliser mes rêves, espoir de croire qu’il existe des personnes comme vous dans ce monde qui s’acharnent de jour et de nuit pour le bonheur des autres, alors merci, merci du fond du cœur, je ne saurais redonner l’amour que vous nous donnez. Je vous fais des bisous. AVO
- *Madame Lalasoa est la directrice du centre Akany Avoko Ambohidratrimo. Elle est à l’initiative de ce projet d’aide aux jeunes ayant obtenu le baccalauréat et qui, sans aide, ne pourraient pas poursuivre leurs études car ils doivent quitter le centre à leur majorité.
- ** Pascale et Olivier sont les fondateurs de l’association SESAAM